La fête bat son plein : foule, fanfares, pavoisements.
Les relations diplomatiques sont rompues entre l’Autriche et la Serbie. voyage ; aussi.
Inauguration du monument au colonel Germain. Dans le square fleuri, où s’élève une tribune réservée aux autorités, le public, les sociétés se groupent, se pressent autour du monument. Marseillaise. Le voile tombe. Je revois, figé en bronze, l’explorateur africain que j’ai connu si vivant. C’est bien sa physionomie intelligente et résolue. On espérait que viendrait, qu’il prendrait la parole. Mais systématiquement il est chambré.
le remplace. Tête et mâchoires carrées, cheveux en brosse, grosses moustaches, épais sourcils, regard dur, il n’a pas l’air sentimental. Pourtant, ému par le souvenir du bon camarade disparu, troublé aussi par ce nombreux auditoire, il tremble un peu. Sûrement, il aimerait mieux commander une charge que prononcer un discours.
Autres allocutions. Le secrétaire d’État, soucieux, a l’air de quelqu’un dont l’esprit a devancé le corps autre part. « L’heure est grave », dit Mangin en passant près de moi. Le Lorrain, devenu soldat d’Afrique, unit dans une même angoisse sa et sa grande patrie menacée.
Autour du square, baraques, jeux, orgues de barbarie. Qu’une fête foraine se mêle à la solennité d’aujourd’hui, cela me choque comme un manque de respect envers le héros disparu, et la mélancolie de mes souvenirs s’en accroît. Déjà entré dans le passé, ce soldat énergique que j’aurais si naturellement pris, au besoin pour défenseur ! Sa main robuste modérait sa pression pour ne pas meurtrir la mienne et cette menotte frêle dépose des fleurs sur sa tombe et sur le socle de sa statue !
L’inauguration du monument au colonel Germain
Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 437.
Dimanche 26 juillet, Brive est effectivement en fête : dans le cadre du XXXIIe Congrès national des sociétés françaises de géographie (19-26 juillet 1914) – sous la présidence du comte –, c’est l’inauguration du monument à la mémoire du colonel Germain.
Joseph Marcel Germain est né en 1865 à Maurs (Cantal) et passe une partie de son enfance à Brive. Après avoir réussi le concours de Polytechnique, il choisit l’artillerie de marine.
Dans le cadre de la conquête coloniale de l’Afrique et aux côtés de Marchand, dont il est le second, Germain participe à la mission Congo-Nil entre 1896 et 1899. Même si la mission Marchand – c’est l’autre nom qui lui a été donné – se solde par un échec face aux Britanniques, suite à l’évacuation du poste de Fachoda, au Soudan, elle a marqué les esprits. Le retour à Brive du capitaine Germain en 1899 est l’occasion de grandes manifestations populaires. En savoir plus
Promu entre temps au grade de colonel, il meurt en 1906 à Paris alors qu’il est chef de la section technique des troupes coloniales au ministère de la Guerre.Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.
Charles Mangin (1866-1925)
Ce Lorrain participe à la mission Congo-Nil sous les ordres de Jean-Baptiste Marchand. En 1910, il publie un ouvrage, La Force noire, qui préconise l'utilisation des troupes africaines dans le cadre d'un futur conflit européen. Colonel au début de la Première Guerre mondiale, il est promu général et s’illustre lors de la bataille de Verdun en 1916.
Général Mangin, 1915 (Agence Rol).
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France, département Estampes et Photographies, Rol, 44963.
Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.