Jeudi 1er avril 1915

Je souffre pour toi, Grèce, pour toi Italie, de vous trouver si mesquines, si mercantiles, si dégénérées.
Neutre, en certains cas est synonyme de pleutre.

 

 


Samedi 3 avril 1915

Adieux de  et du Belge Edgard Séghers. Dix-huit ans tous deux, de doux et gentils enfants que je considérais comme des écoliers, qui deviennent nos défenseurs et qu’on ne reverra peut-être jamais. Je leur en parle presque gaîment ; mais lorsqu’ils ont disparu, j’ai maternellement pleuré sur eux.

« On ne fait plus de prisonniers. »

 

 

une des nombreuses réalisation de Louis Macary

Une des nombreuses réalisations de Louis Macary et son père François : la Cité des Roses construite en 1932 par l'Office d'Habitation à Bon Marchés de la ville de Brive. C'est le premier habitat collectif de ce type à Brive.

 

Louis Macary (1896-1981)

Fils de l’architecte municipal de Brive François Macary, il est lui-même architecte. Après-guerre, aux côtés de son père, il contribue à la construction de la Cité des Roses, première cité d’habitat collectif de Brive (1934).

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Dimanche 4 avril 1915

Il est, ce me semble, tout indiqué de généraliser une expression très usitée chez les commères de ce pays, quand elles veulent empêcher leurs enfants de tripoter quelque chose : « Touche pas ça, c’est caca. » Désormais, il faudra exprimer l’horreur et le danger par ces mots : « Ne faites pas ça, gardez-vous de ça, c’est K K. »

Découverte à Paris, chez le sculpteur allemand , de vingt-trois bustes de  en bronze, en cire, en plâtre, cachés un peu partout, et certainement destinés à remplacer sur nos avenues et dans nos palais celui de la République. Bezner, quand il a filé sur Zurich, achevait un buste monumental en cire rouge. Le bronze rend mieux l’arrogante dureté du Kaiser ; mais la cire rouge, quel admirable symbole de cette sanglante et fragile souveraineté. Et comme le plâtre exprime aussi sa fausse et périssable grandeur (son cabotinage).

 

 Le buste du Kaiser

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Buste de Max Bezner représentant le Kaiser. A l’arrière-plan la propriété de Huis Doorn (Pays-Bas) ou l’empereur Allemand s’exila de 1920 à 1941.
Cliché : Hanseichbaum

Max Bezner (1883-1953 ?)

Sculpteur allemand (Stuttgart 1883 - Berlin 1953 ?).

Guillaume II de Hohenzollern (1859-1941)

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 841.

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 841.

Né à Berlin, Guillaume II est le dernier empereur (Kaiser) allemand et le dernier roi de Prusse.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.


Lundi 5 avril 1915

C’est le lundi de Pâques, un de ces jours où nos concitoyens vont d’ordinaire se régaler de crêpes et s’amuser à . Un groupe de jeunes fous et folles, en route pour le lieu de plaisirs malgré la tristesse des temps, traversait le pont, mais de l’hôpital est sorti un corbillard voilé d’un drapeau et suivi de soldats ; la troupe frivole s’est arrêtée, les femmes se sont signées, les hommes découverts ; et, toute la mélancolie de l’heure leur étant apparue, leur gaîté s’est éteinte.

 

 Entrée du bourg de Malemort au début du XXe siècle

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Carte postale : archives de Brive 37Fi 1786

37fi1585

Le village de Malemort avant 1914.
Carte postale, archives de Brive, 37 Fi 1585.

Malemort

Commune limitrophe située à l’est de Brive, elle est aujourd’hui devenue la deuxième commune la plus peuplée de l’aire urbaine de Brive.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Mardi 6 avril 1915

Être chevaleresques avec les Boches, ce serait imiter don Quichotte délivrant des brigands qui s’empressait de le détrousser…

 

 Joffre et Don Quichote

Caricature par J.F Barats

Caricature par J.F Barats


Mercredi 7 avril 1915

, , , , ce sont des dompteurs de bêtes fauves, des belluaires, eux, non des conducteurs de peuples ; parce que les Allemands, animaux féroces, se sont laissés dompter, museler et enchaîner par ces belluaires, ceux-ci ont cru qu’ils nous dompteraient de même, à coups de triques et bottes. Ils ont lâché leur ménagerie sur nous ; mais ils ont trouvé des hommes vrais, de vrais surhommes, des héros qui, leur ayant cassé les reins, vont faire rentrer ours, tigres, hyènes et vautours dans des cages solidement cadenassées.

 

Marche triomphale sur Paris

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Otto von Bismarck (1815-1898)

Homme d’État prussien, il est chancelier de la confédération de l’Allemagne du Nord en 1867. Après la défaite française de Sedan, il est l’artisan de l’unité allemande qui est proclamée à Versailles, dans la galerie des Glaces, le 18 janvier 1871. Bismarck devient alors le premier chancelier du Reich allemand et il le restera jusqu’en 1890.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Otto von Bismarck

Friedrich von Bernhardi (1849-1930)

Général allemand durant la Grande Guerre, Bernhardi jouit d’une grande popularité dans son pays. Il la doit au succès de son ouvrage, publié en 1911, L’Allemagne et la prochaine guerre.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Friedrich von Bernhardi.

Friedrich von Bernhardi.

Heinrich von Treitschke (1834-1896)

Professeur à l’université de Berlin et député nationaliste, cet historien allemand, réputé pour ses thèses antisémites, a soutenu la politique de Bismarck.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Guillaume II de Hohenzollern (1859-1941)

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 841.

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 841.

Né à Berlin, Guillaume II est le dernier empereur (Kaiser) allemand et le dernier roi de Prusse.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.


Jeudi 8 avril 1915

Il n’est plus question des . Le forcement du détroit est-il abandonné ? Quant à notre offensive, on veut bien nous affirmer qu’elle commencera « quand nos armements le permettront ». Voilà où l’on en est, après huit mois de guerre ! Ceux qui par leur incurie, leurs pillages et leur basse courtisanerie démagogique ont infligé à la nation ces mois d’horribles souffrances sont bien coupables !

 

 

 Carte pour suivre les opérations militaires Dardanelles, Mer de Marmara et Bosphore Éditeur : ed. Blondel La Rougery (Paris) Source : Gallica

Carte pour suivre les opérations militaires Dardanelles, Mer de Marmara et Bosphore
Éditeur : ed. Blondel La Rougery (Paris)
Source : Gallica

Dardanelles (détroit des)

Le 19 février 1915, la flotte alliée bombarde les positions ottomanes à l’entrée du détroit des Dardanelles. C’est le prélude à un débarquement franco-britannique, le 25 avril 1915, qui se soldera par un échec coûteux en vies humaines.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Vendredi 9 avril 1915

Une légion italienne, une phalange grecque, une armée canadienne combattent avec nous. Où est l’armée, la légion, le régiment des États-Unis ? Il n’y a donc plus que des busimen au pays de Washington et l’on ne s’y souvient donc plus de  et de  ?

O mon Dieu ! comme vous nous faites mériter le salut !

Et les Autrichiens rebombardent Belgrade…

 

 

1784 par Rossiter et Mignot, 1859 The Metropolitan Museum

Washington et Lafayette au mont Vernon
1784 par Rossiter et Mignot, 1859
The Metropolitan Museum

La Fayette (marquis de) (1757-1834)

Né Marie Joseph Paul Yves Roch Gilbert du Motier, le marquis de La Fayette, dès 1777, combat aux côtés des « Insurgents » américains qui luttent alors pour leur indépendance. En 1917, des soldats américains se recueillent sur sa tombe, à Paris, et l’un d’eux aurait eu ce cri du cœur : La Fayette, nous voici !

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Rochambeau (comte de) (1725-1807)

Jean-Baptiste-Donatien de Vimeur, comte de Rochambeau, est le commandant du corps expéditionnaire français, riche de 6 000 hommes, envoyé par le roi de France, en 1780, combattre les Britanniques dans le cadre de la guerre d’indépendance américaine.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Samedi 10 avril 1915

Papa Bourdon est promu . Dans son théâtre de marionnettes, il a fait l’apprentissage de l’emploi et s’en tire remarquablement ; sa grosse voix et ses apostrophes dramatiques épouvantent les camelots et les paysannes. Guignol devenu commissaire, transformation cocasse !

Matin et soir, je me jette avidement sur les journaux mais, bientôt, agacée de tous leurs vains et maladroits racontars sur ce que nous ferons « sans doute », sur ce que feront « peut-être », l’Italie, la Roumanie, la Bulgarie, la Hollande… je jette au loin les gazettes et je retourne à quelque travail urgent. Acta non verba.

Toujours pour chaque famille le même calvaire : mobilisation, déclaration de guerre, départ, craintes, manque de nouvelles, pénible nouvelle.
Laurent a reçu au bras droit un éclat d’obus qu’on lui a extrait le 30 mars ; et nous apprenons l’accident le 10 avril par un de ses camarades, et nous savons seulement qu’on l’a opéré dans une ambulance du vaste front ; cette ignorance, cette impuissance sont terribles. Hier, j’ai envoyé au pauvre garçon, avec une lettre et un colis, un rameau de laurier bénit qu’il ne recevra peut-être point.
Chrétiens fervents patriotes. Le major Lalande, à force de démarches, s’est fait envoyer au front ; et , père de six enfants et dispensé de droit, vient de s’engager…

 

Une lettre de Brive

Brive,  carrefour ferroviaire, est un point de de passage régulier pour les renforts venant du Sud de la France. En ce jour du 10 avril 1915, Emile Moureu, soldat du 14e de ligne, originaire de Sauveterre-de-Béarn, profite d’une courte halte à la Gare de de Brive pour envoyer plusieurs cartes postales à sa famille. Sa correspondance, communiquée aux archives de Pau par sa famille, est mise en ligne progressivement sur le site http://emile-moureu-lettres-1915-1918.pireneas.fr

Un éclat d’obus

Éclats d’obus reçus dans la région frontale gauche par le soldat de 2e classe Eugène Cogne (1892-1992), du 2e régiment de tirailleurs algériens, le 25 juillet 1916 à Souville lors de la bataille de Verdun. Collection Jérome Grzybek (Grand Collecte Archives de Brive)

Éclats d’obus reçus dans la région frontale gauche par le soldat de 2e classe Eugène Cogne (1892-1992), du 2e régiment de tirailleurs algériens, le 25 juillet 1916 à Souville lors de la bataille de VerdunCollection Jérome Grzybek (Grand Collecte Archives de Brive)

 

Sergent de ville

Agent de police armé et chargé de maintenir l’ordre dans les lieux publics. Ce sont aujourd’hui les gardiens de la paix.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Antoine Lalande

Antoine Lalande a fait ses études à Brive, une première année de droit à Toulouse, et obtenu une licence et un doctorat de droit à Paris. Il entre aux Assurances générales de France. En postes à Lille, puis à Rennes et Nancy, il revient ensuite sur Paris. Il est le père du général André Lalande (1913-1995), Compagnon de la Libération : http://www.ordredelaliberation.fr/fr_compagnon/543.html.

 


Dimanche 11 avril 1915

Dimanche dernier, deux immenses  du dépôt de convalescents, trop régalés en ville et par suite un peu titubants, surpris par l’orage, s’arrêtaient devant ma fenêtre sous une trombe de grêle et d’eau. Leur chéchia à la main, gesticulant, se donnant de grandes explications, s’exclamant tout ruisselants, le crâne haché de grêlons, ils prolongeaient leur station, ravis peut-être de l’ablution envoyée par Allah.
Aujourd’hui, les deux mêmes spahis se sont pris de querelle, nul ne sait pourquoi. Les sergents de ville ont voulu intervenir et l’un d’eux a traité un des adversaires d’Arbico. Celui-ci est entré dans une colère épique : « Pas Arbico, mi, Français ti sais ! » et il a fait pirouetter le sergent de ville ; quatre ou cinq agents ont voulu secourir le premier ; le terrible noir les a bousculés comme des petits garçons ; l’autre « Sénégal » prenait maintenant le parti de son pays ; 200 badauds s’exclamaient autour d’eux. Je m’écrie : « Ti avoir raison, Sénégal, ti vrai bon Français, blessé pour France, ti frère ! » Alors le « Sénégal » veut me serrer la main et tout le monde veut la lui serrer ; les agents s’humanisent et chaque spahi de protester : « C’est pas mi, ti sais. »

 

Abdoulaye N’Diaye, Sénégalais blessé et soigné à l’hôpital de Brive en 1915. Portrait réalisé par Henriette Gautru avec des timbres-poste de l’époque. Collection archives municipales de Brive.

Abdoulaye N’Diaye, Sénégalais blessé et soigné à l’hôpital de Brive en 1915. Portrait réalisé par Henriette Gautru avec des timbres-poste de l’époque.
Collection archives municipales de Brive.

Spahi

Cavalier appartenant à un régiment de l’armée française d’Afrique du Nord.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.


Mardi 13 avril 1915

Redoublement d’angoisses pour nous : notre pauvre 12e corps est à l’honneur et à la peine.
Nos régiments, ceux qui sont formés des fils du pays, le 95e, le 326e, et le 126e de ligne, lancés en Woëvre contre l’élite des troupes messines, sont décimés ; 20 000 hommes sur 40 000 seraient hors de combat ; si nous reprenons le sol envahi, c’est par les plus sanglants sacrifices.
Quoiqu’il ne nous le dise point parce qu’on défend de le dire, cependant, je sais que Germain est au  dans la neige et sous la mitraille, et qu’il court en qualité de téléphoniste des dangers extrêmes.
J’attends toujours la nouvelle qu’il est blessé, mort ou disparu.

Maury blessé et dans un état désespéré.
Lacoste atteint ; voilà ce qu’on entend.

Belges.
Le docteur belge établi à  déclare qu’au moment où la Belgique se vit forcée d’opter entre l’opprobre et l’esclavage ou l’écrasement, elle n’avait que 120 000 soldats. Les Allemands, croyant la traverser au pas de parade, s’avançaient élégants, assurés, en tenue de revue vers Liège où ils allaient tomber par milliers. Dans une lettre venue de la Belgique par la Hollande, un père écrit à son jeune fils engagé volontaire dans l’armée belge : « Je sais que tu as changé de maison. Je compte que ton nouveau patron,  sera content de toi. Sers-le de ton mieux. »

Ils ont cru le coq gaulois transformé en chapon et ont voulu le dévorer.

 

 

Bois-le-Prêtre

Massif forestier situé sur les hauteurs des côtes de Moselle, à l’ouest de Pont-à-Mousson, il a été l’objet de combats acharnés entre Français et Allemands de l’automne 1914 au printemps suivant.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Objat

Commune corrézienne située à une vingtaine de kilomètres au nord de Brive. Avant la Grande Guerre, elle était considérée comme la « capitale des petits pois ».

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.

Albert Ier (1875-1934)

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 769.

Carte postale. Archives municipales de Brive, 37 Fi 769.

Albert Ier, roi des Belges, est monté sur le trône le 23 décembre 1909. Lorsque les troupes allemandes envahissent son pays, État neutre, le 4 août 1914, il résiste à l’occupation, ce qui lui vaudra le surnom de « roi-chevalier ».

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Jeudi 15 avril 1915

Nos gouvernants ont manqué étrangement de clairvoyance en ce qui concerne l’Allemagne ; mais ceux d’Allemagne en ont manqué plus encore en ce qui nous concerne. Sire, vous qui vous piquez de talent musical, vous n’auriez eu qu’à vous faire exécuter par des Français « Le Chant des Girondins », « Le Chant du départ » et « La Marseillaise » pour sentir qu’un peuple capable de tels accents, non seulement ne se laisserait pas écraser comme un ver, mais encore possède une force élastique. Avec de pareils chants, on s’élance radieux au martyre pour la patrie ; soulevé, enlevé par eux, on n’est d’ailleurs plus une faible créature, on a dans les mains des armes d’une trempe divine, au cœur une flamme dévorante, aux épaules des ailes, on est archanges, on terrasse le dragon.

Tant que les nations n’auront pas créé une gendarmerie, une magistrature chargées de surveiller et punir les peuples, les dirigeants assassins et voleurs, la guerre et la paix armée subsisteront et s’aggraveront. Faisons la Ligue des honnêtes gens, mais ayons la force à notre service.
Hymnes des autres nations : œuvres de compositeurs gagés, non d’un soldat héroïque, d’un libre citoyen ; non religieuses, nos hymnes mais superlativement guerriers ; défi, tocsin, charge, grondement de canon, diane de la liberté. Le courage, la liberté, l’orgueil, la justice y mêlent leurs clameurs.

 

 


Samedi 17 avril 1915

Sans le vouloir, je heurte mes voisines qui sont mères, surtout selon la chair, et qui ne voient que les souffrances de leurs petits ; tandis que chez moi, le dévouement filial prime tout, et la patrie est une mère au-dessus de l’autre ; mais le sentiment maternel aurait chez moi une autre forme, car je saurais armer mes fils selon les lois de l’honneur, les enseignements de la religion et du patriotisme.
Mme B. ayant dit devant moi à une nouvelle mariée qui a causé la mort de son premier né à force de vouloir cacher son état : « Les enfants ne causent que des soucis ! n’en désirez pas ! » Je n’ai pu m’empêcher de m’écrier : « Ce que vous dites n’est ni chrétien ni français ! »
Les  auraient encore une façon de faire leur devoir de Français. Mais ils se déroberont à celui-là aussi : ils fuient toutes les charges, soit à la baïonnette, soit domestiques…

 

 

Embusqué

Militaire affecté, par faveur, à un poste éloigné de tout danger.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.


Mardi 20 avril 1915

Gibier :
La chasse est interdite ; seuls quelques braconniers font la guerre aux animaux sauvages. Lièvres et perdreaux se congratulent et se demandent si l’homme a fait la paix avec les bêtes ? – Non, c’est l’homme qui cette année est le gibier de l’homme.

 

 


Mercredi 21 avril 1915

Le mouleur italien Martini, devenu notre concitoyen affectionné, est mort après une courte maladie. L’ancien maire , son ami qui l’assistait à ses derniers moments, lui a dit : « L’Italie prend les armes pour lutter avec nous ; et le drapeau italien va être hissé comme celui de la Belgique, de l’Angleterre et de la Russie au balcon de l’hôtel de ville, auprès du drapeau tricolore. » Le brave artiste a répondu : « Alors je meurs content. »

 

Un sculpteur à Brive

L’Atelier du sculpteur Martini, situé au boulevard du Salan, produisait sculptures et moulages pour la France entière. Louis Victor Martini était né en 1860 à Borgo-Mozzano en Italie.

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En-tête de facture de l’Atelier Martini

 

 

 

Jean Fieyre (1861-1922)

Professeur au collège Cabanis (actuel lycée d’Arsonval), il est maire de Brive à trois reprises : de 1908 à 1910, puis de 1911 à 1912 et, après la guerre, de 1919 à 1922.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2015.


Vendredi 23 avril 1915

Son fiancé, un brillant officier colonial, a été tué au début de la guerre ; elle a pris le grand deuil, qui lui sied à ravir, et s’est faite infirmière. Charmé de sa figure de carnée, touché de ses soins délicats, un blessé demande sa main et la revoilà, sous ses crêpes de veuve, fiancée à un autre. Ce nouveau futur repartant pour le front, rien ne défend de penser, que s’il n’en revient point, la jolie infirmière se fiancera une troisième fois avant la fin de la guerre. Ah ! pauvres morts héroïques ! Qui gardera fidèlement votre souvenir ; et, s’il n’y avait pas un trésorier-payeur quelque part, qui vous récompenserait ?

 

 


Dimanche 25 avril 1915

Savoir qu’il existe tant et de telles souffrances et qu’on ne peut rien pour les soulager !

 

 


Lundi 26 avril 1915

Nos soldats, nous-mêmes, nous sommes arrivés à un tel degré d’animosité, d’exaspération contre les Boches que les représailles les plus affreuses nous semblent aujourd’hui légitimes, je dirai presque, nécessaires.

 

 


Mercredi 28 avril 1915

Ce qui rend la guerre moderne plus haïssable encore, c’est qu’elle annihile souvent le courage individuel. Essayez, sous des nuées de vapeurs asphyxiantes ou des jets de pétrole enflammé ou des obus tirés à 30 km, de vous conduire en héros ! Grâce à la satanique Allemagne et aux inventions des savants, les horreurs de la guerre qu’essayent de peindre Callot sont amplifiés, dramatisés si kolossalement que les nations vont s’en trouver épuisées, ruinées, saignées à blanc. La science n’a plus qu’un but en ce moment, perfectionner des moyens de destructions déjà effroyables.
On ne fait plus de prisonniers ; de part et d’autre, on tue tout ce [qui] donne signe de vie… Horreur ! Nous avoir conduits jusque-là, nous, les préconiseurs de fraternité universelle !
Mais soit ! périssons tous ou écrasons le monstre.

 

 


Vendredi 30 avril 1915

Les mouchards –  qui débusquent les autres – mauvais Français – les fils dans ma main.

 

 

Embusqué

Militaire affecté, par faveur, à un poste éloigné de tout danger.

Texte rédigé par les élèves de seconde du lycée Cabanis lors d’ateliers aux archives municipales de Brive en 2014.