Mercredi 18 avril 1917

 

Mimi L. achève son printemps avec celui de l’année. Amaigrie, minée par la fièvre, la voix éteinte, elle garde un sourire de bonheur, un regard brillant, un facile enthousiasme pour toute beauté. Tous ceux qui la connaissent s’efforcent d’embellir ses derniers jours. On se relaye pour lui tenir compagnie.
La petite fille de Mme C. et moi, qui nous appelons toutes deux Marguerite, nous nous joignons parfois à la Marguerite mourante, plus exquise que ses sœurs vivaces.
Aujourd’hui, la malade n’a pas eu la force de se lever. Mais le printemps est venu la trouver sous la forme de clartés blondes entrant par les croisées, de bouquets de violettes et d’un lilas blanc en fleur déposés près d’elle. À sa demande, je me suis mise au piano et je lui ai chanté des airs berceurs qu’elle aspirait comme de l’oxygène. Le cœur serré, j’avais de la peine à conserver aux notes une pureté, une douceur capable de satisfaire l’âme d’artiste de Mimi.

Ne cherchons pas des sauveurs : travaillons nous-mêmes à notre Salut.